La perversion c’est quoi ?
La perversion se produit même dans les meilleures entreprises. On peut la rencontrer dans l’enseignement, dans les grandes multinationales, dans les entreprises d’artisanat ou dans un petit magasin de quartier.
Pourtant, quel que soit l’endroit où un « noyau pervers » apparaît, ses victimes en souffrent.
La psychanalyse nous offre des outils importants pour comprendre le côté sombre des complications relationnelles sur le lieu de travail.
L’idée de noyaux pervers fait référence à une coalition dynamique de personnes puissamment organisées au sein d’un groupe plus large.
Sur le lieu de travail, un pervert kernel est un groupe de personnes centré autour d’une personne qui les organise contre un ou plusieurs collègues de manière insidieuse – empoisonnant leurs relations, sapant la valeur du travail des autres et, répandant le désespoir sur les personnes en dehors de la coalition.
Ces noyaux impliquent une alliance qui agit de manière parasitaire, déformant les faits réels et les pervertissant pour des gains narcissiques et parfois matériels.
Sur le plan psychologique, un fantasme partagé d’indestructibilité et d’impénétrabilité se réalise.
Pervers narcissiques au travail
Les actions des noyaux pervers dans les environnements de travail sont fondées sur une sorte d’illusion de grandeur, même si elles n’apparaissent pas comme telles.
La certitude d’invulnérabilité et le sentiment d’omnipotence que partagent les membres de ces groupes, qui dépassent les limites d’un simple fantasme, en sont la preuve.
C’est une sorte de certitude délirante, une sorte de « folie » dont les symptômes se manifestent chez les autres. Néanmoins, les modalités de sa mise en œuvre sont socialement adaptées à tous égards.
Le plus souvent, le chef d’une telle équipe perverse est quelqu’un qui occupe un poste secondaire ou auxiliaire et qui ne veut pas progresser ou aller ailleurs.
La plupart d’entre eux créent un poste de contre leader. En outre, les chefs de noyau peuvent être des personnes qui ne peuvent tout simplement pas tolérer les capacités de leurs collègues, et qui tentent donc de saper leur travail, leur position ou leur image aux yeux des autres.
Pourtant, pour que cette alliance perverse soit maintenue, elle doit être dissimulée.
Les secrets et le silence sont les règles principales et implicites qui rendent l’expérience de travailler aux côtés d’un noyau pervers désorientante et déroutante.
Pour comprendre les noyaux de perversion, nous pouvons nous inspirer de ce que Racamier (1992) a appelé la « pensée perverse », comprise comme l’exact opposé de la « pensée créative ».
La pensée perverse n’est pas motivée par la curiosité ou les émotions, ni par l’engagement avec d’autres penseurs ou idées. La pensée perverse est plutôt motivée par le désir de maîtriser, d’agir et de manipuler les autres. Elle est fondamentalement narcissique et mégalomane.
Une personne dotée de ce type de réflexion possède une compétence exceptionnelle pour percevoir rapidement les capacités et les faiblesses d’une autre personne, puis les utiliser contre elle.
Il s’agit donc d’un « pervers narcissique » (Racamier, 1992), capable d’entraîner l’autre dans des contradictions, des allusions et des mensonges artificiels, grâce à une utilisation extrêmement compétente du langage. Le moment venu, ils parviendront à les discréditer et à les isoler du groupe de personnes avec lequel ils travaillent et dans lequel ils ont investi.
Le pervers narcissique (Racamier, 1992, Hirigoyen, 2012), qui est l’inspirateur discret de cette équipe, est une personne qui ment, dégrade et accuse volontiers les autres sans aucun sens de la loi.
Le but d’une telle personne est d’atteindre une influence sournoise et voilée.
De plus, elle vise à la désintégration des autres, à une sorte de destruction du groupe, quelle que soit sa taille. Dans les milieux de travail, ils orchestrent autour d’eux des noyaux pervers de manière insidieuse et méthodique.
Aussi répugnants que puissent être ces pervers narcissiques, nous devons réfléchir à la manière dont les idéaux narcissiques de notre époque créent un terrain fertile pour que ces noyaux s’établissent.
La promotion d’un individu sans déficience, qui est meilleur que tous les autres – celui qui « réussit », ou même celui qui est omnipotent – transforme la culture de notre vie professionnelle en entreprises surhumaines qui compriment l’endurance humaine.
Dans ce modèle narcissique d’être au travail, nous sommes tous séduits par la transformation en avatars qui peuvent atteindre des objectifs imaginaires à une vitesse qui n’est pas humainement possible.
Ce sont les récits narcissiques d’une époque qui finit par nourrir des narcissiques encore plus déprimés et démunis qui, à leur tour, tentent de survivre au travail en empoisonnant les gens qui les entourent.
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Quelle solution ?
Les psychopathologies de la vie professionnelle sont les symptômes d’une morbidité plus profonde au niveau du social, de « l’Autre ».
Dans la pensée psychanalytique, si nous voulons éviter d’être victimes de cette perversion du travail, nous devons revenir au domaine de l’humanité, qui s’accroche à notre sens des limites, du contact émotionnel, de la réalité, de la satisfaction réaliste et de la réussite. Sans cela, nous ne pourrons tout simplement pas survivre.